Licenciement pour inaptitude : procédure, droits et pièges à éviter

Un salarié est déclaré inapte par le médecin du travail. Que faire ? Licencier n’est pas une option automatique. La procédure est strictement encadrée, et les risques juridiques pour l’employeur sont réels : nullité du licenciement, indemnités majorées, voire sanctions pénales.
Comment bien gérer cette situation ? Quelles sont les étapes clés ? Quels sont les droits du salarié selon l’origine de l’inaptitude (professionnelle ou non) ? Et quelles indemnités sont dues ?
Cet article vous guide pas à pas, avec des exemples concrets, des modèles de lettres, et les dernières évolutions jurisprudentielles (2025).
1. Qu’est-ce qu’un licenciement pour inaptitude ?
1.1. Définition et cadre légal
Le licenciement pour inaptitude intervient lorsque :
- Le médecin du travail déclare le salarié inapte à son poste (physiquement ou mentalement).
- Aucun reclassement n’est possible dans l’entreprise (ou le groupe).
- Le salarié refuse les postes proposés (sous conditions).
Base légale : Code du travail, articles L. 1226-2-1 et L. 1226-12.
À noter : Ce licenciement n’est pas une sanction et ouvre droit à des indemnités spécifiques.
1.2. Origine de l’inaptitude : professionnelle ou non ?
| Inaptitude non professionnelle | Inaptitude professionnelle |
|---|---|
| Maladie ou accident hors travail | Maladie ou accident lié au travail (AT/MP) |
| Indemnité de licenciement classique | Indemnité doublée |
| Pas d’indemnité compensatrice de préavis | Préavis payé même s’il n’est pas exécuté |
2. Procédure pas à pas : de l’avis d’inaptitude au licenciement
2.1. Étape 1 : L’avis d’inaptitude du médecin du travail

À savoir : Le médecin ne transmet pas les détails médicaux à l’employeur, seulement les restrictions (ex. : « pas de port de charges lourdes »).
2.2. Étape 2 : La recherche de reclassement
Obligation légale : L’employeur doit chercher un reclassement, sauf dispense du médecin.
Comment procéder ?
- Proposer des postes adaptés (même catégorie ou inférieure, avec accord du salarié).
- Consulter le CSE (Comité Social et Économique) avant toute proposition.
- Étendre la recherche au groupe si l’entreprise en fait partie.
Exemple de poste adapté :
« Un salarié inapte à son poste de manutentionnaire peut être reclassé en tant qu’agent administratif, avec une formation complémentaire. »
Refus du salarié :
- Le salarié peut refuser, mais sans motif légitime, cela peut être considéré comme abusif (Cass. soc., 7 mai 1996, n° 92-42572).
- Conséquence : Perte des indemnités spéciales (pour inaptitude professionnelle).
2.3. Étape 3 : Convocation à l’entretien préalable
Si le reclassement est impossible, l’employeur engage la procédure de licenciement :
- Convocation écrite (LRAR ou remise en main propre) 5 jours ouvrables avant l’entretien.
- Entretien préalable :
- Exposer les raisons du licenciement (inaptitude + impossibilité de reclassement).
- Écouter les explications du salarié.
Modèle convocation à un entretien préalable au licenciement :
entretien_prealable_au_licenciement_personnel
Erreur à éviter : ❌ Convoquer le salarié le jour même de l’avis d’inaptitude (Cass. soc., 4 novembre 2015, n° 14-11879).
2.4. Étape 4 : Notification du licenciement
Délai : 2 jours minimum après l’entretien préalable. Forme : Lettre recommandée avec AR (modèle ci-dessous).
Contenu obligatoire :
- Motif précis : « Inaptitude constatée le [date] + impossibilité de reclassement. »
- Détail des recherches de reclassement (postes proposés, consultations du CSE).
- Indemnités dues (selon l’origine de l’inaptitude).
Modèle de lettre de licenciement pour inaptitude :
lettre-de-licenciement-pour-inaptitude.docx
3. Droits du salarié et indemnités
3.1. Indemnités selon l’origine de l’inaptitude
| Type d’inaptitude | Indemnité de licenciement | Indemnité compensatrice de préavis | Autres sommes |
|---|---|---|---|
| Non professionnelle | Légale ou conventionnelle | Non due | Congés payés, RTT, CET |
| Professionnelle | Double de l’indemnité légale | Oui (montant = préavis légal) | Congés payés, RTT, CET |
3.2. Cas particuliers : refus de reclassement et faute inexcusable
Refus abusif du salarié :
- Perte des indemnités spéciales (Cass. soc., 20 février 2008, n° 06-44867).
- Mais droit à l’indemnité légale maintenu.
:
- Si l’inaptitude est due à un manquement de l’employeur (ex. : non-respect des règles de sécurité), le salarié peut obtenir une indemnité supplémentaire (minimum 6 mois de salaire).
- Cumul possible avec l’indemnité spéciale (Cass. soc., 17 mai 2006, n° 04-47455).
4. Pièges à éviter pour l’employeur
5. Contentieux et recours
5.1. Contestations fréquentes devant les prud’hommes
Les salariés contestent souvent :
- L’absence de recherche sérieuse de reclassement.
- L’origine professionnelle de l’inaptitude (pour obtenir les indemnités doublées).
Exemple de jurisprudence :
« Un salarié licencié pour inaptitude non professionnelle a obtenu gain de cause : l’employeur n’avait pas consulté le CSE. » (Cass. soc., 28 mars 2007, n° 06-41088).
5.2. Preuve de l’origine professionnelle
Le salarié doit prouver :
- Le lien entre sa maladie/accident et le travail.
- Que l’employeur connaissait ce lien au moment du licenciement.
Exemple :
« Un salarié a prouvé son inaptitude professionnelle grâce à un certificat médical et des témoignages sur ses conditions de travail. » (Cass. soc., 10 septembre 2025, n° 23-19841).
6. Licenciement d’un salarié protégé : Procédure renforcée
Pour un élu du CSE ou un représentant syndical :
- Entretien préalable (comme pour tout salarié).
- Consultation du CSE (obligatoire).
- Demande d’autorisation à l’inspection du travail.
Risque : Nullité du licenciement si l’autorisation n’est pas obtenue.
Vous gérez un cas d’inaptitude ? Consultez notre checklist pour éviter les erreurs !







